Printemps 2053 – Nouveaux jours

Au printemps 2053, j’ai entrepris un voyage à vélo à travers la France, parcourant plus de 1000 km sur 6 semaines. Mon but était simple : rencontrer au hasard de mon chemin des inconnus et recueillir leurs histoires. Chacun de nous a des récits personnels qui révèlent bien plus qu’ils ne le laissent paraître. Ces histoires reflètent notre époque, nos territoires, la complexité et la tendresse des relations humaines. À travers ce projet sur les routes de France, j’ai souhaité capter des témoignages de notre société. Voici l’un d’entre eux.

Pour en savoir plus sur le projet Printemps 2053


Abel
32 ans
Designer textile
Rencontré le 27 mai 2053 à Sète, Hérault

À la terrasse d’un café, mon regard se pose sur les chaussures en toile savamment brodées de l’homme assis à la table d’à côté. J’engage la conversation pour en savoir plus.

C’est drôle, vous êtes la deuxième personne à me parler de mes chaussures aujourd’hui. Tout à l’heure quelqu’un d’autre m’a demandé où je les avais achetées. Vous savez quoi ? C’est un modèle unique et c’est moi qui les ai faites, enfin, en partie. […] Je ne suis pas cordonnier, mais designer textile de profession. J’ai seulement retravaillé la toile de la chaussure. […] Tout est partie d’un trou. C’est-à-dire que, je ne sais pas comment j’ai fait, mais la semaine dernière j’ai troué la toile de ma chaussure. Un trou dans la chaussure en toile blanche, ça se voit de suite. J’ai recousu la chaussure, mais on voyait encore la couture. Je sais coudre mais je ne suis pas magicien, je ne peux pas faire disparaître les marques de couture. Donc par-dessus, pour cacher le trou, j’ai utilisé ma brodeuse pour réaliser un motif que j’ai dessiné. Pour le motif, je me suis inspiré du travail de william morris. Depuis, beaucoup de personnes me parlent de mes chaussures. C’est bien, ça me fait de la publicité. Qui aurait cru qu’un trou dans une chaussure allait me faire autant de pub (rire). […]
J’ai ma propre boutique de vêtements depuis peu, elle est rue Jean Jaurès. Ça commence à bien marcher, je suis content, le bouche-à-oreille doit fonctionner. […]
Dans la boutique, je  ne vends que très peu de vêtements. En fait, je fais surtout de la retouche. C’est-à-dire que les clients viennent avec leurs vêtements et ma mission c’est de le retravailler. Je répare et j’améliore les vêtements. […] C’est un travail qui nécessite de la créativité mais avant tout, de l’écoute. Il est indispensable de comprendre les envies et besoins des clients. C’est un métier formidable, c’est gratifiant de voir le sourire des clients quand ils viennent récupérer et essayer leurs nouveaux vêtements, ça donne du sens à ce que je fais. […] Je fais à la fois des projets sur mesure et accessibles. Tout le monde n’a pas les moyens d’aller chez le tailleur et acheter de nouveau vêtement pour chaque occasion paraît absurde. Il suffit parfois de pas grand-chose pour qu’un vêtement abîmé ou vieillot redevienne une pièce magnifique. […]
Un des derniers projets était une demande d’une cliente qui voulait donner une nouvelle jeunesse à sa robe. Elle devait la porter pour le mariage de sa meilleure amie dont elle était témoin. La robe était en très bon état, en revanche il faut dire que les motifs avaient mal vieilli. Le bon coté c’est que ces motifs avaient été réalisés avec une teinture Textipaint®*, il a suffi de les enlever en trempant la robe dans une solution enzmatique adapté pour ensuite réaliser d’autres motifs en lien avec les exigences de la cliente. Je lui ai redonné la robe comme neuve, une robe unique au monde inspirée par sa personnalité et l’évènement (rire). Oui j’en fais des caisses, mais je suis fière de ce que j’ai fait. […]
* Textipaint® est une teinture brevetée permettant de colorer le textile avec différentes teintes. Il ne se dégrade pas au passage à la
machine à laver, pour l’enlever, il est nécessaire d’utiliser une solution enzymatique adaptée.

 


 

L’industrie du vêtement

L’empreinte carbone de l’industrie textile représente jusqu’à 10 % des émissions de gaz à effet de serre mondiaux. Les jours de la fast fashion sont comptés.
Réduire l’impact environnemental de nos habits ne veut pas dire que l’on devra porter les vieux vêtements de nos placards que l’on trouve vilains. Nous pouvons par exemple acheter des produits faits en Europe plutôt qu’au fin fond de l’Asie, acheter ou revendre nos vêtements que l’on ne porte plus parce qu’ils sont trop petits ou trop moches. On peut aussi faire le choix de matériaux plutôt que d’autres, réparer ou transformer ses vieux vêtements ou chaussure.
Autrefois, quand on allait à une cérémonie, les femmes avaient pour coutume de se rendre chez le chapelier pour habiller leur chapeau de ruban, fleur, plume… Le chapeau se transforme continuellement et s’adapte aux évènements, c’est tout de même mieux que de finir au fond d’un placard.

 

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